DIU Maladies génétiques – approche transdisciplinaire, entretien avec A. Herson et M. Frischmann

Ariane Herson et Martine Frischmann sont les coordinatrices pédagogiques du DIU Maladies génétiques – approche transdisciplinaire, dirigé par le Pr Alexandra Durr et le Pr Marcela Gargiulo. Le DIU démarre sa 3e édition en janvier prochain. Cette formation réunit des participants issus aussi bien du secteur hospitalier que des secteurs médico-social et associatif.
L’objectif de cet enseignement est de transmettre des connaissances sur la génétique et ses avancées récentes dans le domaine de la recherche et de la clinique. Il est également d’enrichir les pratiques avec une réflexion sur les questions soulevées tout au long de l’accompagnement des personnes atteintes de maladies génétiques et de leur famille – que ces questions soient d’ordre génétique, psychologique, social, d’ordre juridique ou encore d’ordre éthique, philosophique ou religieux.
Compte tenu des développements récents en génétique, la mise en perspective des apports des différents champs de la clinique et de la recherche nécessite une approche transdisciplinaire.

 

Cette formation met l’accent sur une approche transdisciplinaire, pourquoi  ?
Ariane Herson – Je pense que cela correspond à la pratique très spécifique de la génétique. La pratique à l’hôpital est interdisciplinaire puisque de nombreuses spécialités y sont exercées, et si éthiciens, sociologues ou juristes interviennent ponctuellement au cours du DIU, c’est parce que le sujet soulève des questions qui concernent l’ensemble de la société, et que nous avons besoin de nourrir de regards croisés notre réflexion et celle de nos étudiants. Aucune discipline ne peut répondre à elle seule à la complexité des enjeux médicaux, psychologiques, juridiques et éthiques, que la maladie génétique soulève.

Martine Frischmann – En effet, les points de vue individuel et collectif sont à prendre en compte : la maladie génétique ne concerne pas que la personne qui consulte mais vient toucher de plein fouet la constellation familiale. Et il est important de confronter aux normes morales et sociales les façons de penser des différents membres de la famille impliqués. En particulier lorsqu’il s’agit de prendre des décisions tel le recours au DPN, au DPI ou à l’IMG.

AH – Un autre enjeu concerne l’évolution des technologies en génétique, notamment l’accès de plus en plus répandu aux tests sur internet, mais également la prescription de l’analyse de l’exome. Celle-ci, devenue très fréquemment utilisée dans la recherche d’un diagnostic de précision, soulève aussi de nombreuses questions éthiques.

MF – Parmi ces questions, il y a celle des données secondaires non sollicitées : la probabilité est grande, lors de l’analyse de l’exome, d’identifier des variants qui n’ont rien à voir avec la maladie qui fait l’objet de l’étude génétique, variants dont l’interprétation peut être incertaine. Comment et quand aborder cette question avec les personnes testées ?

Autre élément de la transdisciplinarité  : le DIU aborde aussi la question de la contribution religieuse dans le vécu et l’accompagnement des maladies.
MF – Effectivement, la personne qui consulte doit être considérée dans sa globalité : son histoire, la culture dans laquelle elle a grandi, ses valeurs, ses positions religieuses font partie de cette globalité et vont jouer un rôle majeur dans ses prises de décision. C’est le cas, par exemple, face au risque de transmission d’une maladie génétique à un futur enfant.

AH – L’objectif est d’amener des professionnels très spécialisés à avoir en tête une vision globale de la personne pour l’accueillir et l’accompagner.

Deux formations différentes sont dispensées au sein du DIU pour l’édition 2019.
AH – Il y a cette année une nouveauté due à l’obligation de formation continue qu’ont désormais les médecins et les infirmier(e)s, qu’ils exercent en milieu hospitalier ou en en libéral. Deux journées** seront ainsi dédiées à des modules différenciés auxquels les professionnels pourront participer. Nous aurons donc deux types de public cette année  : les participants inscrits pour l’ensemble du DIU (une quinzaine) et les médecins et les infirmier(e)s inscrits uniquement à l’un des modules ou aux deux (jusqu’à 48).

Des «  séminaires d’intervision  » ont lieu à six reprises au cours de la formation, en quoi consistent-ils  ?
MF – Les séminaires d’intervision sont destinés à questionner et enrichir la pratique des participants au DIU. Ce sont des moments réservés aux échanges entre les stagiaires sur des situations cliniques qu’ils exposent en présence de l’équipe pédagogique  ; moments très riches au cours desquels s’expriment à la fois les points de vue de personnes d’origine professionnelle différente et de personnes concernées elles-mêmes par une maladie génétique.

Pour quelle raison organisez-vous, à la fin de la formation, une table ronde avec des personnes concernées  ?
AH – C’est une autre spécificité du DIU. Trois personnes concernées par des maladies génétiques viennent témoigner  : une personne elle-même atteinte d’une maladie neuromusculaire, le père d’un enfant malade, et l’épouse d’un homme atteint d’une maladie neurodégénérative. Ils apportent leurs réflexions, leurs points de vue, leur histoire. L’idée est de montrer la dimension familiale et de souligner que le savoir n’est pas détenu uniquement par les professionnels. C’est un moment fort de la formation. Les participants sont extrêmement reconnaissants à ces personnes de venir témoigner.

 

* Médecins, psychologues, ARC, conseiller(e)s en génétique, référents parcours santé (RPS), secrétaires de consultation ayant un rôle de coordination et de suivi, infirmier(e)s, assistantes sociales. Mais aussi médecins libéraux, enseignants travaillant dans le milieu du handicap.

 

** En accord avec les orientations nationales, deux journées ont été définies  : une première le 30 janvier 2019 qui traitera des tests présymptomatiques en neurogénétique et des enjeux éthiques de l’évolution des technologies en analyse génétique. La seconde journée aura lieu le 13 mars 2019 et portera sur l’annonce du diagnostic d’une maladie neurologique d’origine génétique.

 

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